Antide Janvier à Morez (1771 - 1772)

Antide Janvier n'avait que 20 ans à cette époque, mais pour lui plus que pour beaucoup, la valeur n'attendit pas le nombre des années. Il avait en effet déjà réalisé nombre de pièces d'horlogerie, dont une sphère céleste et un grand planétaire qui fut présenté à Louis XV.

Fuyant probablement la colère d'un ministre, «cherchant à faire oublier dans la retraite ses anciens rapports avec la cour» [C0007], il arriva à Morez, au hameau des Chalettes, en 1771, et y répandit les techniques horlogères. Il consacra son séjour à enseigner aux horlogers du voisinage «les mathématiques des rouages, et l'art de les réaliser au mieux en fonction des mouvements, ainsi que de l'esthétique et la proportion de ceux-ci» [B0002]. Il complète ainsi le savoir empirique des horlogers de Morez. «Il rectifia les méthodes et apprit à réunir dans les ouvrages l'élégance à la solidité» [A0015, cité par C0029, p. 106]. Certains documents indiquent qu'il introduit l'aiguille des minutes sur les comtoises [E0016].

Antide Janvier était toujours prêt à aider et à enseigner comme en témoigne le rapport du Jury de l'exposition de 1823 en lui décernant une médaille d'or [C0007, p. 258, et E0006] :

En reconnaissant qu'il est de plus en plus digne de cette récompense, le jury croirait ne lui avoir rendu justice qu'à moitié, s'il n'ajoutait pas que, par son influence et ses conseils désintéressés, M. Janvier rend journellement des services signalés à ses jeunes émules. Personne n'est plus érudit que lui. En traduisant les ouvrages des plus grands maîtres, il a fourni aux horlogers peu versés dans la connaissance des sciences anciennes le moyen d'étudier ces ouvrages ; il calcule la denture des rouages pour tous ceux à qui les mathématiques ne sont pas familières ; il est le conseil et l'appui de tous les jeunes artistes doués de quelques talents, et, ce qui n'est pas moins utile, leur censeur sévère quand ils s'égarent. Je jury pense que personne n'a plus contribué que M. Janvier à porter l'horlogerie à l'état de prospérité où elle est actuellement parvenue.

Antide Janvier resta lié à son Jura natal. Ainsi, lorsqu'en 1811, il publie son Essai sur les horloges publiques, il le dédie «aux industrieux habitans des montagnes du Jura, arrondissement de la sous-préfecture de St.-Claude, des communes de Morez, Morbier, Belle-Fontaine, Foncine et autres lieux. Cet ouvrage est dédié comme une marque particulière de souvenir» [D0002].

Et il ajoute un peu plus loin «nul motif d'intérêt ou de vanité ne me guide : en publiant cet Essai je n'ai que des intensions droites, et le seul désir d'être utile».

Il finit en en appelant aux fils de ceux qui l'avait accueilli : «Eh ! que ne peut-on pas attendre d'une classe d'hommes dont les pères souscrivirent, avec enthousiasme, la promesse de fournir aux appointemens d'un jeune Artiste qui répandoit l'instruction dans les humbles ateliers, épars sur cette terre agreste ! »