Wagner J. Bernard-Henri
et Bernard-Henry

Paris - 1790 à 1851

Successeur : François-Armand Collin 

39, rue du bout du monde, rebaptisée rue du Cadran, maintenant rue Saint-Sauveur.

A partir de 1852, 122, rue Montmartre, re-numéroté 118.

J. Bernard-Henri Wagner, parfois appelé Wagner Oncle, crée une maison de fabrication d'horloges d'édifice en 1790, à Paris. Maison importante, s'il en est, puisqu'elle existera jusqu'en 1935, après être passée par des raisons sociales différentes : Wagner, Collin puis enfin Chateau.

Plaque sur une horloge Wagner d'avant 1839 [E378]

J. Bernard-Henri crée donc son entreprise en 1790, rue du Bout du monde. Il semble avoir été l'inventeur de la machine à diviser et à fendre les engrenages avec un couteau en place de fraise [B0008] et est présent à l'exposition de Paris de 1802.

Portrait de Bernard-Henri Wagner. 
Au dos, marqué « Henri Wagner, Mort en 1855,
Horloger du Roy, Père d'Adèle Wagner,
femme d'Adolphe Chantepie » [E0038]

Mais c'est son neveu, Bernard-Henry (ou Bernard-Henri) Wagner, qui est le plus connu. Né le 11 mai 1790, il rejoint la fabrique de son oncle probablement à partir de 1811. Cela ne l'empêche pas d'être affecté en parallèle à la garde nationale, ce service ne nécessitant une présence de que quelques jours par mois. Il restera  ainsi dix ans officier de la garde nationale [E0012]. Après quelques années, il prend la direction de l'entreprise d'horlogerie familiale.

Bernard-Henry Wagner formera à son tour son cousin, Jean Wagner, souvent appelé Wagner neveu. Celui-ci dirigera l'atelier de la maison Wagner pendant des années. Puis il créera, en 1830 [B0003] ou en 1836 [A0012], une entreprise indépendante d'horlogerie d'édifice plus célèbre encore que celle de ses oncles et cousins !

Bernard-Henry Wagner et Jean Wagner avaient une place de choix dans le microcosme de l'horlogerie d'édifice parisienne, ce qui fit même dire au rapporteur de l'exposition des produits de l'industrie de 1844 que «Le nom de Wagner est à la grosse horlogerie ce que les noms de Berthoud, de Breguet, sont à l'horlogerie de précision» [A0010]. Rien de moins !

Prospectus B.-H. Wagner de 1835 [F0110].
Montre trois modèles d'horloges
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Il est vrai que B.-H Wagner a laissé quelques inventions importantes dans l'histoire de l'horlogerie d'édifice. Après avoir reçu une médaille à l'exposition des produits de l'industrie de 1819, il entendit la requête des membres du jury de faire des horloges simples pour la moitié des villages de France qui, dépourvus d'horloge, ne pouvaient acheter des mécanismes sophistiqués. Il chercha donc d'une part à simplifier les modèles pour en réduire le prix et d'autre part à augmenter la qualité et la fiabilité des mécanismes. Avant lui, Antide Janvier avait fait des recherches un peu dans le même sens. De plus, un autre horloger, Ferréol Tissot, présent comme B.-H. Wagner à l'exposition de 1819, s'était lancé sur cette voie avec un certain succès.  

Dessin d'une horloge B.-H. Wagner
Horloge comtoise couplée à
une sonnerie d'édifice [F0009]
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Brevet de B.-H. Wagner, 
couplage d'une comtoise
et d'une sonnerie d'édifice [J0002]
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B.-H. Wagner s'essaya donc à coupler des mécanismes de comtoises bon marchés avec des rouages de sonneries. Certains de ces modèles firent l'objet de brevets ainsi que l'illustre l'extrait d'un brevet ci-contre [J0002]. Cela permet «avec une comtoise de peu de volume et d'un bas prix, [de] conduire le marteau d'une sonnerie pesante et, au besoin, éloignée. Les fonctions de l'horloge consistent à dégager un déclic autant de fois que la comtoise aurait sonné de coups. La force nécessaire pour soulever le marteau de la grande sonnerie est prise dans un poids convenablement réglé par rapport à ce marteau et à la cloche sur laquelle l'heure doit être frappée. C'est une idée de Tissot ; mais les difficultés pratiques avaient fait abandonner la solution que Tissot avait donnée.» [A0009]

En fait, ni Tissot, ni Wagner ne réussirent réellement à imposer cette adaptation des comtoises pour en faire des horloges d'édifice.

Dessin d'une horloge B.-H. Wagner, 1835 [F0110].
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Par contre, B.-H. Wagner simplifia avec succès le modèle des horloges d'édifice horizontales ainsi que les matériaux utilisés pour en réduire le coût et ainsi généraliser sa présence dans les bourgs et villages de France. Il utilisa par exemple des roues et pignons en fer fondu pour les rouages de sonneries. En 1821, le prix de ces mécanismes simplifiés variaient entre 800 et 1200 francs [F0011]. 

Dans son dictionnaire de l'industrie manufacturière paru en 1837, Alexandre Baudrimont écrit : « Pour 500 francs, M. Wagner donne aujourd'hui une horloge aussi exacte que celles qu'on payait plus de 20,000 francs il y a vingt ans. Il est même descendu jusqu'à 250 francs, tout en laissant à l'horloge sa double sonnerie [A0023, p. 356] ».

Un peu plus loin, Baudrimont continue ainsi : « Des horloges sorties des ateliers de M. Wagner se voient dans nos possessions d'Afrique, en Amérique, et dans toutes les parties de l'Europe. Les modèles de cet ingénieur ont été par lui communiqués généreusement au commerce, et plusieurs de ses élèves ont commencé à monter sur d'autres points des fabriques nouvelles de grosse horlogerie [A0023] ». 

Ces horloges simplifiées n'empêchèrent pas B.-H. Wagner de produire quelques horloges plus luxueuses, pour «palais et édifices publics». Celle-ci étaient en cuivre et indiquaient le temps vrai [F0010].

De plus, B.-H. Wagner fut l'inventeur, en 1811, des engrenages terminés sur la machine à fendre ordinaire, au moyen d'un burin ou échoppe tournant à grande vitesse, remplaçant la fraise taillée. Ceci permet de donner à chaque dent sa courbure, ce qui était fait précédemment à la main. «Par ce procédé, les roues toutes montées peuvent être fendues et arrondies du premier coup, et l'on gagne ainsi une exécution plus prompte et de beaucoup plus précise» [A0011].  « Avant M. Wagner on avait voulu résoudre le même problème en attaquant le disque métallique destiné à former le rouage, par une fraise circulaire en acier, dont le bord était creusé convenablement. Mais quand il fallait tremper cette fraise, après l'avoir ainsi creusée, pour la durcir et attaquer le rouage, l'acier ce voilait. M. Wagner fit disparaître cette difficulté en réduisant la fraise à une seule dent qu'il fit tourner avec assez de vitesse pour qu'elle remplaçât le cercle entier de la fraise [A0023]. »

Ces procédés «qu'il a livré au public avec le désintéressement le plus honorable, ont puissamment contribué à l'amélioration de nos filatures» [F0005]. Il écrit «depuis dix ans je termine l'Epicycloïde de mes dentures sur l'outil à fendre ordinaire, et maintenant les filatures emploient ce moyen avec succès» [F0010].

Horloge B.-H. Wagner à double châssis horizontal
antérieure à 1839 [E378]
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B.-H. Wagner s'essaya également à différents assemblages pour les rouages de ses horloges. En particulier, il inaugura pour la cathédrale de Beauvais, un double châssis horizontal, avec le mouvement placé légèrement au-dessus de la sonnerie. Cette disposition fut reprise beaucoup plus tard dans son établissement, alors dirigé par Château [C0018, A0009].

L'inventivité de B.-H. Wagner s'étendit au-delà de l'horlogerie, puisqu'il est cité en 1822 pour une invention consistant à coupler un mécanisme d'horlogerie à des lampes à huile, permettant de faire monter l'huile en quantité suffisante dans les becs des lampes « qui fonctionneraient pendant la durée des plus longues soirées, et même des plus longues nuits, sans être remontées [A0025]. »

Rapport de la société d'encouragement.

Extrait du rapport du 14 novembre 1821, décrivant les horloges simplifiées de B.-H. Wagner :

Dans les horloges de M. Wagner, le mouvement est beaucoup plus petit que la sonnerie, et cependant la précision est telle qu'il suffit pour indiquer l'heure sur un cadran de six pieds (deux mètres) de diamètre, quoiqu'il ne soit mu que par un poids de six livres (trois kilogrammes). L'échappement est à chevilles, le pendule en bois de sapin, pour éviter l'influence des variations de température sur la durée des oscillations ; sa suspension est à ressort, et la lentille est chargée de quarante livres de plomb (vingt kilogrammes). Un mécanisme très simple, placé au premier mobile, sert à remettre l'horloge à l'heure, sans faire courir le rouage, ainsi qu'on le fait ordinairement.

La sonnerie, qui est beaucoup plus forte, est mise en action par un poids proportionné à celui du marteau qu'il doit faire lever, au moyen de huit rouleaux placés sur le champ de la roue du premier mobile. Tout l'appareil de cette sonnerie est composé de trois roues en fer fondu (dont une pour remonter le poids) ; il est renfermé dans une cage, sur l'un des côtés de laquelle se prolonge une seule détente faisant arrêt sur le volant ; cette détente est levée, à chaque demi-heure, par une pièce qui communique au mouvement et forme délai, pour préparer et assurer l'effet.

Cette horloge horizontale est d'un volume extrêmement réduit. La première roue n'a que douze pouces de diamètre (30 centimètres), et la cage vingt-trois pouces sur quinze (60 centimètres sur 40) ; elle sonne l'heure et la demie sur la cloche du village ; ce qui n'empêche pas de sonner cette cloche en volée pour les cérémonies religieuses.

[...] M. Wagner consent à ce que les plans et les calibres de ces horloges soient rendus publics, afin que tout horloger puisse les exécuter ; il ne réclame pour lui aucune indemnité. Ce désintéressement ne surprendra pas les personnages qui connaissent l'étendue des relations commerciales de l'auteur, et le désir qu'il a de contribuer aux progrès de l'art qu'il exerce avec tant de succès.

Source : [repris dans A0003]

Horloge B.-H. Wagner du Panthéon, ayant été l'objet d'une réparation pirate.
Voir http://www.urban-resources.net/untergunther.html
date 1850 à confirmer [E555]
Photos extraites des articles de journaux du Monde et du Guardian, accessibles sur le site web ci-dessus.

Cadran Wagner, probablement B.-H. Wagner
(par opposition à Jean Wagner).
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B.-H. Wagner reçu pour ses horloges et autres inventions des médailles d'argent à toutes les expositions des produits de l'industrie française : 1819, 1823, 1827, 1834, 1839, 1844 et 1849 !

En 1819, il exposa «Une horloge publique de belle forme, allant huit jours sans être remontée, sonnant l'heure et les quarts, avec un pendule composé de 7 pieds de hauteur [un peu plus de 2 mètres]. Une autre horloge d'un très petit volume, animée par un très petit poids, sonnant l'heure et la demie sur un fort timbre. Une machine pour la rotation des phares [A0005].

A l'exposition de 1823, outre sa machine pour la rotation des phares qu'il a perfectionné, B.-H. Wagner exposa des horloges qui sont «belles et solides ; toutes les parties en ont été perfectionnées depuis la dernière exposition ; le volume en est considérablement réduit, et les prix en sont très modérés» [A0006].

A l'exposition de 1827, il exposa probablement une horloge à remontoir d'égalité [G0061]. Celui-ci était constitué d'un poids agissant sur l'échappement et remonté toutes les deux minutes par le poids moteur. Il est vraisemblable que ce soit ce même remontoir qui fut ensuite utilisé par Gourdin, Jean Wagner ou Adam et que Gourdin attribua à Wagner Oncle dans un article de la Revue Chronométrique de 1865 [D0010].

Sous l'impulsion de B.-H. Wagner, l'entreprise se diversifia au-delà de son activité principale en horlogerie d'édifice. Elle fabriquait alors des machines de tout genre, telles que des compteurs, des machines à calculer, des métronomes, des paratonnerres, des tournebroches, des girouettes, etc.

Vers 1837, l'entreprise employait environ 30 ouvriers [E0012] ce qui est important pour l'époque. B.-H. Wagner était alors horloger du Roi.

En l'honneur de l'établissement Wagner, la rue du bout du monde fut rebaptisée rue du cadran, l'entreprise se situant au n°39 de cette rue [avant 1821]. Cette rue changea à nouveau de nom plus tard et s'appelle aujourd'hui rue Saint Sauveur [B0003].

Horloge B.-H. Wagner de 1847 [E292]
Malheureusement l'image est de mauvaise qualité
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En 1852, l'entreprise déménagea au 122, rue Montmartre, qui fut ensuite re-numéroté 118 [F0039].

B.-H. Wagner céda son établissement à Collin le 21 juin 1852, après environ quarante ans de carrière [F0039]. Il mourut en 1855.

Dernière mise à jour de cette page : 12/12/2010