Paul Odobey Fils
Lucien Terraillon et J. Petitjean Succrs
Morez (Jura) puis Perrigny - 1880 - ca. 1971

Entête de lettre Paul Odobey, 1907
(Cliquer sur les bâtiments
pour agrandir) [F0055]

Fils aîné du fabricant d'horloges d'édifice Louis Delphin Odobey Cadet, Paul Odobey [1851 - 1923] crée sa propre entreprise en 1880, à Morez (Jura). A l'instar de celle de son père, la maison Paul Odobey devient l'une des plus importantes fabrique de France.

En 1908, Lucien Terraillon [1877 - 1932] et J. Petitjean succèdent à Paul Odobey. Puis, Terraillon reste seul. A son décès, l'entreprise passe à son fils Paul qui arrêtera l'activité horlogère vers 1971 pour se concentrer sur la fabrication de balances.

Paul Odobey

Signature de Paul Odobey Fils [F0057]

Né le 28 avril 1851, à Foncine-le-Haut (Jura), Paul Auguste Odobey arrive en 1852 avec ses parents à Morez (Jura). Son père crée alors ce qui deviendra l'une des principales entreprises d'horlogerie d'édifice de France.

Paul épouse le 17 septembre 1878 à Morez, Marie Aline Brasier, fille d'un horloger de la ville [E0019]. A leur mariage, les époux disposent de la coquette somme de 30.000 francs, apportés pour les 4/5e par la famille Brasier [E0017].

Paul décède le 30 novembre 1923 à Lyon, 3e. Il a alors 72 ans [E0019].

Les débuts

L'année de son mariage, en 1878, Paul se dit «employé de maison de commerce» [E0017].

Une autre source le cite comme étant mécanicien-serrurier à Foncine, mais cela n'est pas vérifié [E0019].

A 21 ans, alors qu'il travaillait probablement chez son père, Paul participe à l'exposition universelle de Lyon, en 1872. Par la suite, Paul sera un des rares horlogers a ne pas faire la chasse aux médailles. Cependant, il utilisera cette présence à l'exposition de Lyon pour orner ses lettres, catalogues et prospectus de ce qui ressemble à s'y méprendre à des médailles.

Après avoir travaillé avec son père, Paul souhaite prendre la direction de l'entreprise paternelle. Celui-ci refuse et donne sa part à Paul qui crée, en 1879 - 1880, une entreprise concurrente dans le même bourg de Morez. Paul a alors 29 ans et est marié depuis peu. Il est probable que la fortune apportée par la famille de son épouse ait servi de déclencheur aux velléités indépendantistes de Paul. Pendant ce temps, les trois frères de Paul continuent à travailler dans l'entreprise paternelle [K0012, F0057].

Paul Odobey [E0033]

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Horloge typique Paul Odobey - 1897 [E014]

Horloge à remontage tous les huit jours,
sonnant les heures, les demies et la répétition des heures.
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Bien que concurrentes, les entreprises Paul et Louis-Delphin collaborent, et ce même après la mort de celui-ci. En effet, les modèles sont extrêmement semblables et évoluent conjointement. Afin de prévenir toute confusion dans le courrier provenant des clients, Paul précise bien sur son papier à entête «Prière de mettre l'adresse complète Paul Odobey Fils sans oublier le prénom» [F0055].

 

L'activité de l'entreprise

L'entreprise Paul Odobey est essentiellement centrée sur les horloges d'édifice. Les modèles sont en tous points semblables à ceux de Louis-Delphin Odobey. Il est probable qu'une forte coopération technique et industrielle existe entre les deux entreprises, au moins durant les premières décennies : même évolutions techniques, probablement mêmes fournisseurs et sous-traitants.

Un prospectus de 1891 donne une liste d'horloges Paul Odobey installées avec seulement une centaine d'exemplaires [F0058]. Toutes n'y sont peut être pas répertoriées. L'essentiel est installé dans un grand quart sud-est de la France. Les régions Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Languedoc-Roussillon, Franche-Comté et Bourgogne totalisent en effet 75% des ventes de France. Notons également que 14% des horloges sont installées en Suisse ou en Algérie.

Horloge Paul Odobey [F0057]
Lettre-type de 1879, donc
probablement la première lettre-type.
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Cette répartition géographique des ventes est relativement proche de celle de l'entreprise de Louis-Delphin. Comme pour celui-ci, la vente et la pose des horloges repose sur un réseau de distributeurs, mais les éléments nous manquent pour en exposer les détails. Nombre d'horloges Odobey portent en fait le nom de leur installateurs, tels que Badier & Paulin à Grenoble. Il n'est alors pas possible de savoir si ce sont des horloges Louis-Delphin ou Paul Odobey. De plus certains installateurs changeaient de fournisseurs, à l'instar de l'entreprise Bodet, basée près d'Angers, qui commença par poser des horloges Louis-Delphin pour ensuite s'approvisionner chez Paul Odobey.

Avant 1891, Paul réalise une horloge pour l'observatoire de Besançon, référence importante puisque les observatoires ont un besoin extrême de précision [F0058].

Comme son père, Paul dépose les modèles d'horloge qu'il fabrique auprès du bureau des brevets. En 1891, il dit en avoir déposé vingt-quatre.

Comme son père encore, Paul est armurier [E0019] . En 1892, en plus des horloges d'édifice, il se dit également fournisseur d'horloges de précision et de luxe, d'horloges astronomiques, réparateur d'anciennes horloges et fabricant d'engrenages et de petite mécanique de précision [I0006, F0058]. Cependant, il semble que son activité soit restée essentiellement centrée sur les horloges d'édifice.

Paul cède son entreprise à Lucien Terraillon en 1908. Il a alors 58 ans seulement et n'est pas malade. Nous ne savons pas ce qui l'a poussé à cette cession. Il semble avoir eu une fille (Jeanne Odobey, mariée Guilleard) et peut-être un fils mais peut-être celui-ci était-il décédé à cette époque [E0053].

Un complexe industriel significatif

L'entreprise est située sur la Grande Rue, actuellement rue de la République. Reprenant les bâtiments de l'entreprise de lunetterie et d'horlogerie Alphonse Lamy, l'affaire de Paul Odobey se développe pour devenir un ensemble immobilier et industriel important qui s'étend de la Grande Rue à la rivière de la Bienne, enserrant ce que l'on appelle aujourd'hui la cour Paul Odobey (propriété privée). Il est aux numéros 94 à 100, puis s'étend jusqu'au 102 de la Grande Rue (entre 1892 et 1907) [I0006]. L'importance de ces bâtiments s'expliquait entre autre par la nécessité de loger les ouvriers sur place [K0016].

Au fond, bâtiments de l'entreprise Paul Odobey
Première moitié du XXe siècle [I0006]
(Cliquer  sur l'image avoir une vue globale de la carte postale)

Cependant, que l'on ne se méprenne pas : les dessins d'artiste qui ornent les lettres déforment sensiblement la réalité. Dans les faits, les bâtiments, quoique nombreux, sont beaucoup moins imposants qu'ils ne le paraissent sur les dessins.

Il n'en reste pas moins vrai que la fabrication des horloges Paul Odobey, de même que celles de Louis-Delphin, est réalisée de façon industrielle. Sur ce plan, les autres fabricants moréziens sont distancés [K0017].

Comme les autres fabricants, Paul Odobey exploite l'énergie hydraulique de la Bienne. En 1910, cette forme d'énergie semble encore exclusive d'autres sources d'énergie [F0060].

Les bâtiments de l'entreprise Odobey [I0002]

Vue de dos par rapport au dessin du papier entête. On reconnaît (points jaunes) le hangar allongé, avec de part et d'autre deux bâtiments de l'entreprise et derrière le toit en zinc de la maison de Paul Odobey, construite en 1900. L'immeuble blanc en second plan est récent.

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 Catalogue Paul Odobey Fils de Mai 1897. 4 Pages au format A3 [F0116]
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Lucien Terraillon et J. Petitjean

Lucien Terraillon [E0020]

Lucien Terraillon naît à Vienne (Isère), le 8 mai 1877. Il étudie à l’École Nationale d’Horlogerie de Cluses de 1895 à 1899, et en sort avec la médaille d'or. En 1908, il prend la suite de Paul Odobey Fils, et continue à faire prospérer la fabrique.

Lors de la reprise de l'entreprise Odobey, Terraillon est associé à J. Petitjean. Nous ne savons pratiquement rien sur ce dernier qui semble être un financier. Petitjean quitte l'entreprise avant 1929. Note : une entreprise Petitjean est mentionnée en 1926, avenue Camille Prost à Lons. Son propriétaire réside alors au 16, place Bichat à Lons [E0019]. Est-ce le même Petitjean ? Nous ne le savons pas.

Lucien Terraillon donne de l'ampleur à l'entreprise. Les ventes augmentent dans les années précédant la guerre de 1914.

En 1910, il gagne une médaille d'or à l'exposition de Bruxelles.

En 1921, Terraillon transporte l’installation de l’entreprise à Perrigny, près de Lons-le-Saunier. Il y réalise une usine de premier plan « de l’air, de la lumière, un souci méticuleux de la propreté, des machines de haute précision, fonctionnant avec le minimum de force motrice, des transmissions souples auxquelles les roulements à billes enlèvent toute dureté, des méthodes de travail en contraste absolu avec les vieilles coutumes d’autrefois, voilà ce qui caractérise l’usine de la Gravière. »

En plus de l'usine, il crée une cité ouvrière. C'est la grande époque du patronat paternaliste.

Technicien de premier ordre, Lucien Terraillon est aussi homme d’affaire intelligent, et commerçant droit et précis. «C’était en même temps un homme aimable, un patron dévoué et consciencieux, toujours arrivé premier au travail » [E0020].

L'usine de Perrigny [I0005]

Carte postale montrant l'importance de l'usine Terraillon
pour la commune de Perrigny [I0010]
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Dans les années 1950, l'entreprise se targue d'être la « la première firme française pour l'exportation de la grosse horlogerie » [F0054]. Les ventes à l'étranger sont particulièrement importantes en Espagne, où l'on retrouve encore aujourd'hui de nombreuses horloges Paul Odobey.

Une liste d'horloges posées par l'entreprise et datant de 1954, contient environ 1800 références. Nous en donnons une analyse dans les graphes ci-dessous [F0053].

Production annuelle d'horloges Odobey  - Terraillon (en unités) [F0053]

Note : dans les graphismes ci-dessus, les horloges anciennes sont probablement significativement sous représentées. En effet, environ 500 horloges sont données sans date et, à chaque fois que nous avons pu vérifier, celles-ci étaient anciennes. Nous pensons donc que le nombre d'horloges entre 1880 et 1905 environ est sous estimé d'une vingtaine par an environ.

L'analyse géographique des ventes montre une répartition relativement équilibrée sur les différentes régions de France, avec une prédominance des Pays de la Loire (12,5% des ventes) due essentiellement au dynamisme de l'entreprise Bodet dont l'activité principale est l'installation d'horloges Terraillon. Réciproquement, le niveau des ventes est faible dans les régions où la concurrence est importante (Alsace, Ile de France).

Magnifique horloge Terraillon - 1920
[E224 - Musée de l'horlogerie de Cluse]

Horloge sonnant les heures et les quarts, avec répétition des heures. Remontoir d'égalité. Forme de platine atypique.

(cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Sur le plan technique, Lucien Terraillon introduit principalement le remontage électrique des poids.

Il a construit un certain nombre d’horloges à carillon, dont celle de l’Hôtel de ville de Calais (25 cloches) et celle de Notre Dame de Behuard (Maine-et-Loire).

En 1927, il accepte le mandat de juge consulaire au Tribunal de Commerce de Lons-le-Saunier, tâche qu’il conserve jusqu’à sa mort. Il est également membre du Commerce Extérieur et membre du Crédit Immobilier.

Il décède rapidement le 4 avril 1932, à l’âge de 54 ans, laissant son épouse avec plusieurs filles et un fils, Paul Terraillon [E0020]. Celui-ci reprend la direction de l'entreprise.

Paul Terraillon diversifie la production. En 1943, l'énergie est fournie par une turbine. Vers 1950, un atelier de décolletage vient compléter l'usine. En 1965, 70 personnes travaillent dans l'entreprise [I0002].

Vers 1970 ou 1971, l'activité horlogère est arrêtée (par Paul?). Les actifs sont probablement cédés à l'entreprise Bodet. L'activité des balances ménagères et de décolletage de métaux et de plastiques est revendue au groupe Legris qui la revendra à son tour en 1989 au groupe JTD [I0002].

 

 

Horloge Terraillon - Septembre 1959 [E753]
Remontage par un moteur électrique 120V.
Notons la forme très différente entre cette horloge 
tardive et toutes les autres horloges Odobey - Terraillon.
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Les horloges Paul Odobey - Lucien Terraillon

Comme mentionné, les horloges Paul Odobey sont très semblables aux horloges Louis-Delphin Odobey. Il est difficile de les distinguer. La différence principale tient dans la décoration du balancier, qui est orné de fleurs chez Paul Odobey et d'une tête couronnée chez Louis-Delphin. Voir la taxonomie des horloges de Morez pour plus d'informations.

Description sommaire des horloges Paul Odobey

[Source : F0059]

«Les cages sont composées de deux barres de fer cornière, assemblées par des boulons à deux pièces élégantes en fonte ornée, formant quatre pieds ; elles sont vernies noir avec les ornements et filets bronzés. Les roues sont en cuivre de première qualité, croisées a cinq bras, l'épaisseur des roues premières est établie au dixième environ de leurs diamètres, les pignons et les pivots sont en acier, polis avec soin ; les contacts des détentes, accrochoirs, arrêts de volants sont trempés ; les grains dans lesquels tournent les pivots sont en bronze, fixés par des vis ; les levées des sonneries sont en acier trempé ; les cylindres pour enrouler les cordes des poids sont en cuivre ou en acier étiré et poli ; l'échappement est à chevilles ou à ancre de Graham ; la suspension est à double ressort ; la fourchette est à vis de rappel ; le balancier est composé d'une tige en sapin avec lentille lourde servant de compensateur ; les roues, les tiges et toutes les pièces sont adoucies et moirées en partie ; le fonctionnement de l'horloge pendant le remontage du poids du mouvement est maintenu par un ressort auxiliaire. Un petit cadran est placé sur l'horloge pour faciliter la mise à l'heure qui s'obtient au moyen d'un écrou à ailes allant à la main et fixant l'heure à volonté ; toutes les pièces sont assemblées par des vis ou écrous ; la cadrature et la minuterie peuvent se démonter entièrement à la main ; la disposition de ces horloges est des mieux comprises pour faciliter l'installation, le graissage et un parfait entretien.

Toutes les horloges sont assorties de tendeurs à vis pour le tirage des marteaux.

Les horloges ayant le système de sonnerie à Chaperon (roue du compte) ne sont établies que sur commande spéciale. »

Comme pour Louis-Delphin, Paul Odobey fabrique également des comtoises d'édifice, qu'il nomme « horloges verticales » destinées aux petits cadrans et petites cloches.

Dès le début, les horloges Paul Odobey sont garanties 10 ans. De plus, nombre d'entre elles comportent un remontoir d'égalité.

Comme mentionné ci-dessus, Lucien Terraillon introduit et systématise le remontage automatique des poids avec une chaîne. De plus, il utilise un système qui permet de n'avoir qu'un seul poids moteur à remonter, à la fois pour les sonneries et le mouvement. Celui-ci remonte des petits poids secondaires.

Avec les horloges Odobey, une page d'instruction pour l'entretien est la plupart du temps fournie.

 

Horloge Paul Odobey / Terraillon
1909 [F0059].

Horloge typique sonnant les heures et les quarts, se remontant chaque huitaine

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Horloge Paul Odobey / Terraillon
1909 [F0059].

Horloge typique sonnant les heures et les demies, se remontant chaque jour

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Horloge Paul Odobey / Terraillon
1909 [F0059].

Petite horloge peu courante pour Hôtels de ville, écoles, casernes, etc., sonnant les heures, les répétitions et les demies, se remontant tous les 8 jours.

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Horloge Paul Odobey / Terraillon
1909 [F0059].

Petite horloge peu courante pour Hôtels de ville, écoles, casernes, etc., sonnant les heures, les répétitions et les demies, se remontant tous les 8 jours.

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Horloge Paul Odobey
sur papier entête de 1892 [I0006].

La forme des platines est atypique des horloges Paul Odobey habituelles.

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Horloge Terraillon - 1929,
sonnant les heures et les demies et la répétition des heures, et se remontant automatiquement par moteur électrique [F0056]
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Dernière mise à jour de cette page : 02/01/2011