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Louis-Delphin Odobey Cadet
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Photo des employés de la maison L.D.
Odobey. Probablement ca. 1880-1890 |
Louis-Delphin Odobey [1827 - 1906], parfois aussi appelé Delphin Odobey, crée en 1858 à Morez (Jura) ce qui deviendra l'une des plus importantes maisons d'horlogerie d'édifice de France. La société est ensuite reprise par trois de ses fils, Victor, appelé Émile, Jules et Albert. Celui-ci reste seul avant de la céder à son tour à son fils Georges qui devra arrêter l'entreprise en 1964. De plus, en 1880, le fils aîné de Louis-Delphin, Paul, crée lui aussi son entreprise d'horloges d'édifice. Les horloges Odobey sont installées dans toute la France. Avec les fabriques Prost (Paget), Cretin-L'Ange et Bailly-Comte, nous avons là l'essentiel de la production morézienne d'horloges d'édifice. Ces horloges sont techniquement remarquables du point de vue de leur conception et de leur exécution. |
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Première page d'un catalogue L.-D.
Odobey Cadet |
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Né le 15 août 1827, à Foncine-le-Haut (Jura), Louis-Delphin Odobey est le fils de Jean Alexis Odobey (1789 - ), cultivateur et horloger et de Marie Judith Fumey-Badoz (7/10/1787 - ), cultivatrice également [E0015]. Son grand-père était lui-même paysan-horloger et aurait connu Antide Janvier [E0016]. |
Signature de L.-D. Odobey Cadet en
1876 |
A 22 ans, le 17 avril 1850 à Foncine-le-Haut, il se marie à Marie-Célina Jannin [22/10/1829 - 21/04/1888], également de Foncine (Sources : [E0017], [E0015], [E0053] et visite du cimetière de Morez). Le couple donne naissance au moins quatre fils et une fille :
Louis-Delphin décède le 30 janvier 1906, à Morez, à l'âge de 78 ans. |
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Louis-Delphin Odobey [E0025]. |
Au départ, Louis-Delphin est cultivateur et horloger. Il se déclare propriétaire-cultivateur lors de son mariage en 1850, puis horloger l'année suivante, pour la naissance de son fils Paul [C0029, p. 292]. En 1876, il se déclare mécanicien lors de la naissance de Louis Albert [E0044] et enfin fabricant d’horloges en 1888, à la mort de son épouse [K0018].
Le cours d'eau de la Saine, à Foncine, n'offre pas un débit et une régularité suffisante pour l'industrie horlogère. Alors, en 1852, Louis-Delphin part s'installer à Morez et y établit, en 1858, une fabrique d'horloges d'édifice sous le nom "Odobey Cadet", reflétant par là sa place dans la fratrie [E0015]. Notons qu'il a peut-être commencé par fabriquer d'autres types d'horloges avant de se consacrer aux horloges d'édifices. Il fait construire un immeuble au 5 et 6, quai Jobez, quai qui sera ensuite renommé quai de l'Hôpital. Cet immeuble fut détruit en 1990. |
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Établissement L.-D. Odobey Cadet. Un
peu après 1858. |
La renommée de L.-D. Odobey semble se propager assez rapidement puisqu'en 1868, la municipalité de Champagnole fait appel à lui pour expertiser une horloge réalisée et posée par Jean-Marie Fumey, de Foncine-le-Haut. Il s'en suit une controverse assez vive entre les deux hommes, l'horloge de Champagnole étant une horloge à trente heures, mais vendue comme étant à huit jours.
En 1880, Paul, fils aîné de Louis-Delphin se met à son compte dans l'horlogerie d'édifice. Probablement pour éviter les confusions entre les deux maisons, Louis-Delphin modifie légèrement la raison sociale de l'entreprise, qui devient alors "L.-D. Odobey Cadet".
Pour se rendre crédible, et comme la plupart des autres horlogers, Louis-Delphin obtient des récompenses à de plus ou moins prestigieuses expositions :
A la fin du XIXe siècle et au début du XXe, l'entreprise se développe de façon considérable. Au total, sur plus d'un siècle de fonctionnement, environ 5 000 horloges seraient sorties de ses ateliers [E0015]. Ce chiffre, probablement un peu surévalué, permet néanmoins d'estimer que l'entreprise a fabriqué de l'ordre de 100 horloges / an à l'apogée.
Nombre d'horloges posées par la maison |
Vers 1905, la maison L.-D. Odobey a déjà fabriqué plus de 700 horloges en France [F0050]. Ce chiffre ne tient peut-être pas compte de toutes les horloges posées dans les premières années d'une part et d'un certain nombre d'horloges posées par des distributeurs d'autre part.
Nous avons une vue assez précise de la répartition géographique des installations. La moitié sud-est de la France est, de loin, la plus importante, le quart nord-ouest représentant moins de 10% des ventes. Un document des années 1950 [F0065] donne une liste de 2250 horloges, sur 4000 prétendument posées, avec une répartition géographique globalement semblable à celle de 1905 et exposée ci-dessus. Une exception notable : en 1950, 9% des ventes ont été réalisées à l'étranger, principalement en Suisse, Belgique, Espagne et Portugal. Globalement, cette distribution géographique correspond à celle des ventes de comtoises [C0029, p. 240], ce qui accrédite la thèse selon laquelle les établisseurs moréziens tels que les Reydor, Lamy & Lacroix, etc., distribuaient des horloges d'édifice fabriquées par d'autres. |
Horloge L.-D. Odobey Cadet - 1920 |
L'absence de Paris est remarquable dans cette distribution géographique. Elle s'explique par le fait que la capitale ne demande déjà plus à cette époque que peu d'horloges mécaniques et que celles-ci étaient fournies exclusivement par les horlogers parisiens tels que Garnier, Wagner, etc.
Il est difficile de savoir dans quelles proportions la maison L.-D. Odobey fit appel aux établisseurs moréziens ou à d'autres vendeurs et installateurs pour distribuer ses horloges. L'entreprise Bodet, installée à Trémentines dans le Maine-et-Loire, commença dans l'horlogerie d'édifice en distribuant des horloges L.-D. Odobey avant de se fournir chez Paul Odobey. De même, A. Roure, « représentant pour le Département du Puy-de-Dôme », a déjà installé 80 horloges L.-D. Odobey dans le département et quelques communes limitrophes en 1908 [F0048]. Au-delà de ces cas précis, les documents nous manquent pour établir avec précision les réseaux commerciaux de l'entreprise L.-D. Odobey.
Atelier de l'établissement
Louis-Delphin Odobey. |
Toujours est-il que le succès commercial de l'entreprise lui permet d'atteindre jusqu'à quatre-vingt salariés [E0015] tandis qu'elle n'en comptait probablement qu'une vingtaine vers 1869 [I0004] ! Par rapport aux autres fabricants moréziens, les deux maisons Odobey se caractérisent par des moyens de production industriels associés à une quasi standardisation des modèles [K0017]. Ce succès entraîne Louis-Delphin dans une ascension sociale rapide. Il entre au conseil municipal de Morez vers 1875 et en reste membre pendant très longtemps car il est réélu au moins en 1881, 1884 et 1888 [E0019]. De plus, la Chambre Consultative des Arts et Manufactures de Morez l'accueille en son sein vers 1889 et ce jusqu'à sa mort [E0018, E0019]. A l'instar des établisseurs en horlogerie, Louis-Delphin devient un notable de Morez et sa région. |
Le passage de la responsabilité de l'entreprise entre Louis-Delphin et ses fils ne fut pas simple. Paul, désirant utiliser son droit d'aînesse, voulu diriger toute l'entreprise et en devenir propriétaire. Son père refusa. En 1880, il donna sa part à Paul qui créa sa propre entreprise concurrente, pendant que ses frères Victor, Jules et Albert restaient dans l'entreprise paternelle. Victor décède en 1893 en tombant d'un clocher lors de l'installation d'une horloge [K0013]. Puis Jules décède le 24 septembre 1915, laissant Albert seul diriger l'entreprise [K0012].
Mort de M. Jules ODOBEY Source : [E0025] - La France Horlogère, 1915 « M. Jules Odobey était l'une des figures les plus marquantes de l'industrie horlogère comtoise, c'était à la fois un technicien et un artisan, il voyait large et en matière d'outillage avait été un des premiers à s'inspirer des procédés de fabrication américaine, important à Morez des machines tout à fait modernes permettant la bienfacture des horloges poussée au plus haut point de perfectionnement
Malgré une vie professionnelle très chargée, M. Jules Odobey avait accepté de multiples fonctions ; son activité était inlassable, ses facultés d'organisation inépuisables. Une simple énumération des oeuvres auxquelles il prit part montre combien sa vie, trop courte, hélas ! fut remplie : Inspecteur départemental de l'enseignement technique, Membre de la commission d'hygiène, Directeur de la Caisse d'épargne, Président de la société de tir, Président de la Mutualité scolaire, Conseiller municipal et adjoint au maire, Délégué cantonal, Rédacteur à la France Horlogère. Ajoutons que, membre du comité de l'Ecole pratique de commerce et d'industrie de Morez, il s'attacha pendant dix ans, avec une compétence et une activité incomparables, à faire doter l'Ecole des machines les plus modernes et à faire développer l'enseignement donné, afin d'obtenir des ouvriers accomplis pour les industries moréziennes. Il avait des idées justes et bien arrêtées sur l'apprentissage de l'Ecole qu'il voulait voir se rapprocher le plus possible de l'industrie. Dernièrement, il parvint à faire fabriquer par les élèves des grenades pour l'armée, et ce résultat lui causa la plus vive satisfaction. Dès les premiers jours de la mobilisation, M. Jules Odobey, capitaine au 53e territorial d'infanterie, avait rejoint son poste en Alsace. Mais lorsque la pénurie des munitions se fit si durement sentir dans nos armées, sa compétence technique et sa haute intelligence le désignait tout naturellement au choix du Ministre de la Guerre pour un nouveau service plus urgent encore ; c'est alors qu'il fut nommé chef du groupe des usines de Morez travaillant pour l'armée. Dans ces nouvelles fonctions, Jules Odobey fut admirable de ténacité, d'énergie et de travail. Il dut se multiplier pour donner dans toues les usines les renseignements techniques et les conseils, car il fallait modifier l'ancien outillage et l'approprier à la nouvelle fabrication. Mais un tel surmenage ne pouvait qu'affaiblir sa constitution pourtant solide et ne pas permettre à son organisme débilité de résister à la terrible maladie qui l'emporta si rapidement. Sa mort est une perte irréparable pour l'industrie morézienne ; pour notre part, nous perdons en lui plus qu'un collaborateur..., un ami sincère et dévoué ! C'était l'homme qualifié pour organiser de toutes pièces, dans les régions si industrieuses de Franche-Comté, la fabrication en série des pendules et régulateurs dits de la Forêt-Noire, qui est actuellement l'apanage des Allemands. Il était tout désigné pour cette tâche, sa haute autorité, sa compétence, ses talents d'organisateur eussent fait merveille dans la réalisation de cette oeuvre. Il disparaît, hélas ! au moment ou l'autre guerre, la guerre industrielle et économique, où il aurait tenu comme chef une si grande place, va commencer ! Inclinons-nous devant sa tombe et adressons à sa veuve éplorée, à sa famille douloureusement affectée, l'expression bien sincère de nos condoléances les plus émues. H. M.-F.» |
En 1915, Albert reprend donc la responsabilité complète de l'entreprise. Il se marie une première fois en 1910 avec Eugénie-Cécile Labourier [1883-1916] avec laquelle il aura une fille. Après le décès de son épouse, il se remarie en 1918 avec Marguerite Dalloz [E0053]. Il se déclare alors mécanicien [K0017]. Comme son frère Jules, il s'engage dans la vie locale, et devient en particulier inspecteur d'académie de l'enseignement technique. Grâce à lui, une École Nationale Pratique (ENP) s'implante à Morez dans les années 1930. Cet ENP est devenue par la suite le Lycée Victor Bérard [E0027]. Sur le plan de l'entreprise, Albert met en place une activité de décolletage. En 1922, il brevette un mécanisme de remontage automatique pouvant être appliqué aux horloges existantes [C0010, p. 149]. En 1933, il rachète probablement une partie de l'entreprise Labrosse, lui-même successeur de Cretin-L'Ange. Une autre partie de l'entreprise Labrosse semble avoir été transférée à Lyon [K0013]. |
Albert Odobey [E0027] |
Georges Odobey [E0028] |
Ingénieur ENP en microélectronique, Georges (17/11/1919 - 25/06/1992), fils d'Albert, commence à travailler avec son père pendant la seconde partie de la guerre. Au décès de celui-ci, en 1946, les parts sont divisées entre Georges, sa soeur et sa demi-soeur. Puis, dans les années 1950, Georges prend la responsabilité complète de l'entreprise familiale [K0012 et E0028]. Pour faire face à la décroissance du marché des horloges d'édifice, il continue la diversification de la production dans la mécanique de précision et le décolletage. « Georges en personne se chargea de livrer et d'installer les appareils, que ce soit en France ou à l'étranger. Passionné de mécanique, il conçut une machine transfert dont, malheureusement, faute de moyens financiers, il ne put mener la réalisation à son terme » [E0015]. Cette machine transfert devait servir pour la fabrication des boîtes à fromage. Georges en fit un prototype fonctionnel mais ne pu la commercialiser. Sur le plan des horloges, les ventes des mouvements mécaniques décroissaient au fil du temps. L'entreprise compensa partiellement en électrifiant les anciennes horloges, mais cela n'était pas suffisant pour en assurer la survie. En 1964, Georges Odobey dut arrêter l'entreprise. Il devint alors professeur technique au lycée Victor-Bérard [E0015]. |
Citons enfin le témoignage de la fille de Georges Odobey sur cette période : « Je n'ai pas beaucoup de souvenirs de l'horlogerie familiale si ce n'est ma mère en train de peindre un cadran dans la cour et quelques sorties les week-ends pour réparer des horloges, comme à Morzine » [K0013].
Au début de son histoire, la maison Odobey a cherché à maîtriser les métiers amonts - conception des machines-outils, maîtrise de l'énergie de production -, plutôt qu'à se diversifier horizontalement sur d'autres créneaux commerciaux.
En effet, l'entreprise réalise elle-même toutes les étapes ou presque de la fabrication des horloges. Contrairement à la fabrication des comtoises qui se faisait en grande partie par des paysans-horlogers, les pièces d'horloges d'édifice sont principalement réalisées sur place, dans les ateliers de l'entreprise. Comme l'écrit Albert Odobey en 1922 : « tout est entièrement usiné dans ses ateliers, depuis la fonte des roues en laiton et bronze, taillage des roues et pignons jusqu'au décolletage des plus petites pièces employées pour ses fabrications, ce qui, joint aux procédés modernes d'usinage employés, lui permet d'atteindre un prix de revient minimum tout en maintenant la qualité irréprochable des produits. » [F0051]
Cette intégration des métiers de production s'oppose à la diversification des produits réalisés. En effet, jusqu'à la seconde guerre mondiale, l'entreprise reste focalisée sur son activité d'horlogerie d'édifice intégrant la fabrication de toutes les pièces et accessoires qui lui sont liée. Un catalogue de 1910 environ stipule même que l'entreprise fond elle-même ses cloches, ce dont nous doutons eu égard à la haute spécificité de cette activité et aux équipements nécessaires [F0047].
La focalisation sur l'horlogerie d'édifice n'est pourtant pas complètement exclusive. Louis-Delphin a en effet réalisé quelques pièces mécaniques et autres machines, telles que les pièces d'un sismographe destiné à l'Académie des Sciences, ou encore des machines pour limer les tenons, les cercles de lunettes, etc. [E0016]. Un catalogue de 1875 environ témoigne également qu'il fabrique des machines pour l'horlogerie, telles que des machines à diviser les engrenages, des tours, des outils pour tailler les pignons, etc. [F0049].
De plus, pendant la guerre de 1870, il contribue à l'effort de guerre en fabriquant des pièces pour fusils (cf. ci-dessous).
Vers 1895, il fabrique également des horloges et régulateurs électriques perfectionnés [E0018].
Toutes ces différentes activités restent cependant marginales par rapport à l'horlogerie d'édifice. Contrairement à nombre de ses concurrents, L.-D. Odobey ne se lance pas même dans la fabrication des tournebroches ou des paratonnerres.
Ce n'est qu'après la guerre, lors du déclin de l'horlogerie d'édifice, que Georges Odobey tentera une nécessaire diversification.
Pour ce qui est de l'énergie motrice utilisée pour la fabrication, l'entreprise utilise à ses débuts l'eau de la Bienne comme force motrice. Louis-Delphin aménage le cours d'eau à cet effet. Suite à une pétition de 1859, il est autorisé à utiliser une machine à vapeur de quatre chevaux [C0029, p. 189]. Plus tard, L.-D. Odobey ou ses successeurs installent des turbines sur le cours d'eau afin de charger des batteries utilisées ensuite pour alimenter des moteurs électriques [E0015].
L.-D. Odobey et la guerre de 1870
Source : [E0016]
« Lorsqu'en 1870 on fit appel à toues les bonnes volontés, on trouva M. Odobey prêt à tous les sacrifices. Il ne voulut point fermer son usine, comme tant d'autres fabricants, et, pour ne point laisser ses ouvriers dans la misère, il entreprit de substituer à la fabrication des horloges, celle des culasses mobiles de chassepot. Il fut certes loin d'en retirer un bénéfice, car à la signature de la paix, le gouvernement ayant refusé ce qui n'avait pas été livré, le fabricant se trouva avec un laissé pour compte important.
Au cours de cette fabrication, M. L. D. Odobey avait pu remarquer les imperfections de l'arme alors en usage.
Et, en 1872, il prend un brevet d'invention pour un fusil Chassepot perfectionné au sujet duquel nous extrayons presque littéralement ce qui suite d'une brochure, adressée en 1886 par M. A. Picard, à MM. les Sénateurs et Députés :
En 1872, M. Odobey, manufacturier à Morez (Jura) ayant apporté au fusil chassepot les perfectionnements qui devaient plus tard se retrouver dans le fusil dit « Fusil Gras », une commission fut nommée comme celle de 1866 « en dehors de la commission permanente d'artillerie », composée d'un tiers de civils et présidée par le Général Doual ; Chassepot vint lui-même défendre son arme. La supériorité du fusil Odobey qui supprimait l'armer du fusil Chassepot et adoptait la cartouche métallique, fut reconnue.
Le général Doual, très franc, et dont l'absolue loyauté ne saurait être ici mise en cause, mais imbu lui aussi des idées d'exclusivisme qui régnaient dans la commission, aurait dit à l'inventeur : « Notre commission étant faite pour rechercher le perfectionnement à apporter aux armes de guerre, nous ne pouvons adopter le fusil d'un civil !!!... » lui déclarant tout de même qu'il le ferait indemniser de ses dépenses.
Le fusil Odobey fut donc repoussé, grâce à la prédominance de l'élément militaire dans la commission.
M. Odobey ne reçut aucune indemnité pour ses recherches et ses travaux, par suite de la dissolution de la commission et de l'éloignement de son Président.
Quelques temps après il réclama ses deux fusils. On ne lui répondit pas, et ce n'est qu'un an plus tard, après lettres sur lettres, réclamations sur réclamations, qu'on les lui renvoya après avoir eu on ne sait trop pourquoi la singulière précaution de les lui rendre mutilés.
J'ajouterai à cela que des deux fusils types présentés par M. Odobey le manufacturier inventeur de Morez, l'artillerie adopta le moins parfait des deux. C'est à cause de cela que le fusil Gras ne se démonte pas à la main, que l'étui saute à la figure du tireur au lieu d'être rejeté sur le côté, qu'il n'y a pas de cran de sûreté, et que la culasse mobile n'est pas à l'abri du sable et de la poussière.
Si singuliers qu'ils puissent paraître, les fait ci-dessus relatés nous ont été déclarés absolument exacts par M. L. D. Odobey lui-même, qui se dit en mesure de les prouver à qui et quand on voudra ! Nous lui laissons, on le comprendra, l'entière responsabilité d'affirmations que nous n'avons ni le moyen, ni l'intention de contrôler ; nous tenions seulement à établir la part prise par cet inventeur dans le perfectionnement de nos armes de guerre.»
Citons aussi [E0015] :
« [L.-D. Odobey] inventa un système d'éjection latérale de la cartouche pour fusil de guerre bien supérieur à celui du Lebel. Il déposa un brevet, entreprit la fabrication et se constitua une magnifique collection de fusils dont, malheureusement, les Allemands s'emparèrent en 1940. »
Contrairement à d'autres fabricants moréziens tels que Bailly-Comte, les modèles d'horloges L.-D. Odobey sont d'une conception remarquablement constante au cours des décennies. Les documents les plus anciens comme les plus récents donnent à voir les mêmes formes, les mêmes dispositions pour les rouages et les mêmes techniques.
Notons en particulier les points suivants :
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Horloge à quarts - 30 heures |
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Sonnerie à râteau d'une horloge L.-D.
Odobey (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
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Horloge sonnant les heures répétitions et demies se remontant chaque jour
[F0047] |
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Horloge L.-D. Odobey "verticale" [F0047] |
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Horloge L.-D. Odobey sonnant les heures et |
Horloge L.-D. Odobey sonnant les heures, |
Afin de faciliter le réglage et l'entretien de ses horloges, la maison L.-D. Odobey a publié un certain nombre de documents :
«Indications pour le graissage & l'entretien des horloges publiques». Une page, souvent accrochée à l'armoire contenant l'horloge.
«Instruction pour le réglage des horloges». Une page également, intéressante parce que l'heure de référence y est celle du chemin de fer.
«Instructions générales pour la gouverne et l'entretien des horloges monumentales», dont l'auteur est Jules Odobey [D0005]
«Poids & Marteaux d'Horloges de Clocher par L. D. Odobey Cadet - Inspecteur Départemental de l'Enseignement Technique - Fabricant d'Horlogerie à Morez (Jura)», également rédigé par Jules Odobey et publié en 1909 [D0004].
Description Technique des Horloges L.-D. Odobey Cadet
Source : [F0047]
« Dispositions générales. - Ces horloges sont établies avec des métaux (fers, aciers, bronzes et laitons) de 1re qualité. La cage ou bâti du mécanisme se compose de deux barres de fer cornière bien dressé, assemblées par de forts boulons à des traverses en fonte ornementée. Les platines de fonte sont a nervures pour plus de solidité et sont, ainsi que le bâti, vernies noir avec ornements, nervures et filets bronzés. Toutes les roues sont en cuivre ou en bronze, croisées à cinq bras et épaisses sur les dents du dixièmes environ de leur diamètre respectif. Le diamètre de ces roues est calculé de telle sorte que le diamètre de chacune d'elles soit égal aux deux tiers environ de celui de la roue qui la précède immédiatement dans le corps de rouages. Ces roues sont fixées sur leurs axes par des écrous à six faces tournés et polis. Leur denture, ainsi que celle des pignons, est calculée de manière à obtenir le moins de frottement possible et le maximum de solidité.
Les arbres des roues premières sont en acier, les tambours pour enrouler les cordes en cuivre poli, d'une forte épaisseur. Les pignons et les pivots sont d'acier trempé et poli. Les pivots roulent dans des grains en bronze dur fixés par des vis aux platines et aux barres, afin de permettre de démonter chaque mobile séparément. Les roues sont adoucies, les arbres polis, les pièces de la quadrature limées, polies et moirées.
Sur demande et moyennant une augmentation de prix fixée par la maison, les roues peuvent être dorées, les pièces d'acier ou de fer polies et nickelées, les barres de la cage limées avec inscriptions gravées, les ornements des platines et des traverses dorées à la feuille, les faces internes des platines fraisées, etc.
Mouvement. - Le mouvement possède un ressort auxiliaire pour entretenir la marche de l'horloge pendant le remontage du poids moteur. L'échappement est à chevilles et les ancres à recul. La suspension du balancier est à double ressort, avec garde ressort, la fourchette est à vis de rappel articulée et à ressort pour neutraliser les chocs accidentels sur les chevilles de la roue d'échappement. Le balancier se compose d'une lentille lourde et d'une tige compensatrice en sapin verni, système ayant donné jusqu'à ce jour les meilleurs résultats de réglage à cause de la dilatation très faible du sapin, et bat la seconde.
Un petit cadran d'émail fixé à l'horloge et indiquant les heures et les minutes permet, au moyen d'un écrou à ailes mobile à la main, la remise à l'heure très facile des cadrans extérieurs.
Sonneries. - En général, toutes les fois que le poids moteur de la sonnerie est assez considérable pour nécessiter un grand effort au remontage, le corps de rouages de sonnerie est pourvu d'engrenages de remontoir en fonte de fer pour faciliter le remontage du poids moteur.
Les fonctions de sonnerie sont à râteau, système indécomptable. Les volants des sonneries sont à ailes mobiles pour pouvoir régler à volonté la vitesse des sonneries et ont un double encliquetage pour plus de sûreté. La levée des marteaux de sonnerie se fait par des dents d'acier fondu trempé incrustées dans la roue et retenues par des vis, système supérieur à tous autres pour sa solidité, sa durée sans usure appréciable et la bonne levée donnée au marteau.
Les horloges avec sonneries dites à roues de compte ne sont établies que sur commande spéciale et sans aucune plus-value.»
Distinguer une horloge Louis-Delphin Odobey d'une autre horloge de Morez, en particulier celles de Paul Odobey, n'est pas toujours chose facile. Voir la taxonomie des horloges de Morez pour plus d'informations.
De plus, nous ne savons pas si L.-D. Odobey a réellement introduit des innovations dans ses horloges. Il semblerait que les cages en fer cornière assemblées à des traverses de fonte (au lieu de cage en fonte d'une pièce) ou encore les roues à 5 bras puissent lui être attribuées [E0016], mais les sources manquent pour l'affirmer avec certitude.
Louis-Delphin est peut-être le premier des fabricants moréziens à inscrire systématiquement son nom sur ses horloges, et ce dès 1868. De plus, il multiplie les dépôts de marques de fabriques de façon à protéger sa propriété industrielle [C0029, p. 294].
Au début des années 1920, Albert brevette et introduit le remontage électrique des poids. Dans ce système, le poids du mouvement est remonté automatiquement lors du fonctionnement de la sonnerie [F0051].
Sans être complètement absentes, les innovations techniques ne caractérisent donc pas les horloges L.-D. Odobey, ni celles d'ailleurs des autres fabricants moréziens. Le succès de l'entreprise tient plutôt dans la production d'un objet très bien fini, fiable et abordable, ainsi que dans les capacités de le distribuer dans toute la France et au-delà.
Horloge L.-D. Odobey Cadet à remontage électrique, |
Dernière mise à jour de cette page : 11/12/2010